PAR BADREDDINE KHRIS
L’association des banques et établissements financiers (Abef) organise aujourd’hui, à l’occasion de la journée mondiale de l’épargne, une rencontre d’information sur l’inclusion financière sous le thème « l’inclusion financière à l’ère digitale : défis et perspectives ». Les thématiques programmées seront abordées dans les deux panels de discussions interactives prévus à cet effet. Le premier traitera de la « transformation numérique et la culture financière ». Le deuxième a trait à « la finance digitale, facteur de l’inclusion financière ».
Le développement de la culture financière (exemple de la Tunisie), la transformation numérique au sein des banques, des assurances et d’Algérie poste, le rôle de l’intelligence artificielle dans le développement de l’inclusion financière… sont autant de questions qui seront débattues au cours de cette rencontre.
L’inclusion financière est, faut-il l’expliquer, l’offre de services financiers adaptés aux populations exclues du système financier classique, à des conditions soutenables, à la fois pour les offreurs, légalement reconnus, que pour les bénéficiaires. L’inclusion financière est définie par la banque d’Algérie comme étant la disponibilité et l’utilisation de tous les services financiers par les différents segments de la société dont les institutions et les particuliers, surtout ceux qui sont marginalisés, à travers les canaux officiels, notamment les comptes courants et d’épargne, les services de paiement et de transferts, les services d’assurance, les services de financement et de crédit et des innovations des services financiers plus adaptés avec des prix compétitifs et raisonnables.
L’inclusion financière est encore à ses premiers balbutiements en Algérie. Pourtant, ce
mécanisme soutient l’entrepreneuriat et l’investissement en mobilisant des ressources circulant en dehors du secteur bancaire pour augmenter les taux d’investissement et créer des opportunités d’emploi dans l’intérêt public.
Cet instrument œuvre aussi pour la protection des droits des consommateurs de services financiers, notamment les comptes courants et d’épargne, les services de paiement et de transfert, de financement et de crédit… en les soutenant afin qu’ils puissent assurer correctement la bonne gestion de leurs fonds et leur épargne pour éviter qu’ils recourent à des canaux et outils informels.
Les experts soutiennent que l’accès à des produits et services financiers facilite le quotidien et aide les ménages et les entreprises à anticiper le financement de projets de long terme ou faire face à des imprévus. Un individu détenteur d’un compte courant sera plus susceptible de recourir à d’autres services financiers, comme le crédit ou l’assurance, de créer une entreprise ou développer son activité, d’investir dans l’éducation ou la santé, de
gérer les risques et de surmonter les chocs financiers, soit autant de facteurs qui amélioreront globalement son niveau de vie.
Taux de bancarisation insuffisant
Il est admis par tous les spécialistes que l’inclusion financière stimule la croissance économique, réduit les inégalités de revenu et aide les ménages à sortir de la pauvreté. Or l’examen de la situation en Algérie a fait ressortir un retard en la matière. C’est ce que révèlent d’ailleurs certains indicateurs.
L’ouverture d’un compte est considérée comme un pas important vers l’inclusion financière.
Cependant, en Algérie, selon la base de données Global Findex 2017, seulement 43% des adultes possèdent un compte courant. Si ce taux est bien supérieur à la moyenne du monde arabe et des pays à revenu faible, il reste inférieur au taux moyen mondial et à celui enregistré dans les pays à revenu élevé.
Global Findes est, faut-il le préciser, un vaste ensemble de données sur l’utilisation des services financiers dans 183 pays. Il est produit par la banque mondiale, avec le soutien financier de la fondation Bill & Melinda Gates et en partenariat avec Gallup Inc. L’accès à des services financiers abordables joue, souligne-t-on, un rôle essentiel dans la réduction de la pauvreté, la croissance économique et la résilience aux crises.
C’est aussi un jalon primordial pour ouvrir la voie à l’inclusion financière, en particulier pour les femmes. Or, dans notre pays, 57% des adultes en général et 71% des femmes ne disposent toujours pas d’un simple compte courant qui leur permettrait au moins d’effectuer et de recevoir des paiements de manière sécurisée et efficace.
De ce fait, ces populations sont également privées d’accès à d’autres services financiers tels que l’épargne, l’assurance ou le crédit. Les raisons de la non-bancarisation en Algérie, selon l’enquête Global Findex, sont essentiellement liées au fait d’avoir trop peu d’argent pour utiliser un compte (36%), un membre de la famille a déjà un compte (21%), manque de confiance dans les institutions financières (15%).
Le manque du besoin aux services financiers, les procédures et les pièces de dossier de demande exigées, jugées compliquées et le fait que les principes de ces prestations bancaires soient en contradiction avec la religion islamique constituent (intérêt usuraire ou « riba ») également autant de raisons qui dissuadent les citoyens à prendre attache avec les agences.
En ce qui concerne les paiements numériques, l’Algérie affiche des taux insuffisants par rapport à ceux enregistrés au niveau de la région Mena (Moyen-Orient et Afrique du Nord) et des pays à revenu supérieur, particulièrement l’utilisation de l’internet, du téléphone mobile et de la carte de crédit.
Cependant, pour les Algériens qui demeurent peu accoutumés au secteur financier, un meilleur accès aux paiements numériques offrirait une passerelle vers ces services. Selon les statistiques de la banque mondiale, dans notre pays, seulement 16% des adultes en général et 11% des femmes ont recours à des paiements numériques, contre 23% des
adultes et 18% des femmes dans l’ensemble de la région Mena, ces chiffres étant respectivement de 36% et 32% dans les économies émergentes et en développement.
Par ailleurs, l’épargne et l’accès au crédit sont des aspects clés de l’inclusion financière. Selon les résultats de l’enquête Findex, 23% des épargnants algériens ont déclaré
économiser de l’argent à la maison ou réaliser des économies sous forme de bétail, de bijoux ou de biens immobiliers. Les besoins de financement des entreprises et des micro-entrepreneurs restent en outre insuffisamment couverts.
B. K.